Entretien avec Richard Stallman

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Mlinksva - CC byCertains pensent que Richard Stallman a déjà tout dit et qu’il ne fait que répéter (voire ânonner) inlassablement le même discours aux quatre coins de la planète.

Ce n’est pas forcément vrai. Surtout quand l’exercice est un entretien et que celle qui pose les questions oriente habilement la conversation, en particulier sur l’activisme et les conditions de sa réussite.

Et pour vous en donner un avant-goût voici sa réponse à la question de son plus grand échec  : «  Le plus grand échec du mouvement des logiciels libres est ironique  : notre logiciel libre et devenu si attirant pour les geeks que l’usage et le développement de logiciels libres se sont beaucoup plus répandus que l’appréciation de la liberté sur laquelle le mouvement se fonde. Le résultat est que nos points de vue en sont venus à être considérés comme excentriques dans la communauté que nous avons construite.  »

Une traduction Framalang, avec l’aimable autorisation d’Hillary Rettig[1].

Interview de Richard Stallman

Interview with Richard Stallman

Hillary Rettig – 9 février 2009 – LifeLongActivist.com
(Traduction Framalang  : Yonnel et Goofy)

Mon ami Richard Stallman est le fondateur du mouvement du logiciel libre. Ses idées sont à l’origine non seulement du système d’exploitation GNU/Linux, mais aussi de Wikipédia, Creative Commons, de la campagne anti-DRM Defective by Design et d’autres mouvements sociaux importants. Il est lauréat du prix MacArthur, et peut-être l’activiste le plus couronné de succès. Je suis honorée d’avoir pu l’interviewer.

Hillary Rettig  : Qu’est-ce que le logiciel libre  ?

Richard Stallman  : Le logiciel libre, cela implique que l’utilisateur dispose de quatre libertés essentielles  :

  • 0. La liberté d’exécuter le programme comme bon vous semble.
  • 1. La liberté d’étudier le code source du programme, puis de le modifier pour que le programme fasse ce que vous voulez.
  • 2. La liberté de distribuer aux autres des copies identiques du programme. (On appelle aussi cela la liberté d’aider son voisin.)
  • 3. La liberté de distribuer des copies de vos versions modifiées. (On appelle aussi cela la liberté de contribuer à votre communauté.)

Vous travaillez pour la cause du logiciel libre depuis plus de 20 ans. Comment gardez-vous le cap, comment restez-vous «  attaché  » à votre travail, avec le même sentiment d’urgence  ?

J’utilise moi-même des ordinateurs, donc je serai moi-même un de ceux qui perdront leur liberté si le logiciel libre ne s’impose pas. J’ai donc toute la motivation nécessaire pour poursuivre la lutte.

Est-ce que vous ressentez souvent de la peur ou du découragement  ? Comment gérez-vous ces sentiments  ?

Je suis pessimiste de nature, donc il m’est facile d’imaginer la défaite, surtout étant donné la taille des entreprises contre lesquelles nous nous battons, et leur gouvernement lèche-bottes à Washington. Mais il n’en faut pas autant pour me mener au désespoir. Si je fais quelques tentatives pour corriger un bogue et qu’elles n’aboutissent pas, la frustration peut monter au point que je crie d’angoisse. Mais ce sentiment ne dure que quelques minutes, et ensuite je me remets au travail.

Quant à la peur, ma principale peur est la défaite de la liberté. Le meilleur moyen de l’éviter est de continuer, ce que je fais.

Pourquoi est-ce si important de travailler dans une équipe ou une communauté avec un but commun, et qu’est-ce que vous considérez comme une équipe/communauté efficace ou inefficace  ?

La communauté du logiciel libre est très décentralisée – chaque programme a sa propre équipe de support. Il reste beaucoup de place. Si deux personnes ne s’entendent pas, elles n’ont pas besoin de travailler ensemble, elles peuvent travailler séparément. Cela n’élimine pas le problème des conflits de personnalité et des comportements insultants, mais au pire cela ne peut créer que du retard.

Quelles sont vos habitudes de travail, votre emploi du temps, et pourquoi ces habitudes et cet emploi du temps ont-ils évolué  ?

Je n’ai pas ou ne veux pas de journée structurée. Quand je me lève, d’habitude je commence à répondre à mes messages. Quand je sens que j’ai besoin d’une pause, je la prends – je peux lire, rêver, écouter de la musique ou manger. Après un moment, je me remets au travail. Je ne suis pas un emploi du temps, sauf pour les voyages et les réunions. Mais quand même, en ce moment, cela représente une bonne partie de mon emploi du temps, ce qui d’une certaine façon est agaçant.

L’époque où j’étais le plus productif, c’était quand je programmais, en 1982. J’avais très peu de rendez-vous, donc je n’avais pas besoin de gérer un emploi du temps sur 24 heures. Quand j’étais fatigué, j’allais dormir. Quand je me levais, je recommençais à travailler. Quand j’avais faim, je mangeais. Aucun emploi du temps  ! Cela me permettait d’être très productif, parce que quand je ne dormais pas, j’étais complètement éveillé.

Avez-vous déjà pris un congé sabbatique ou interrompu votre tâche d’activiste  ? Pourquoi, ou pourquoi pas  ? Si oui, quels bienfaits en avez-vous retiré  ?

Dans les années 80, quand le mouvement était nouveau et que mon travail en son sein consistait principalement à développer des logiciels, je n’ai jamais pensé à vouloir me mettre en pause bien longtemps. À présent, comme mon travail est principalement de correspondre avec des personnes, je ne peux plus le faire. Les courriers s’accumuleraient horriblement si je ne les traitais pas jour après jour.

Comment jugez-vous votre efficacité à changer les choses  ?

Je ne peux pas être impartial dans l’estimation de mes propres capacités, donc je ne puis répondre à cette question. Ce qui est clair, c’est qu’au moins nous avons mis la première pierre à l’utilisation libre d’ordinateurs, mais nous sommes encore loin de notre objectif  : que tous les utilisateurs de logiciels soient libres. Mais au moins le mouvement des logiciels libres continue à grandir.

Que considéreriez-vous comme vos réussites les plus significatives en tant qu’activiste  ?

Nous avons développé des systèmes d’exploitation libres, des environnements graphiques libres, des applications libres, des lecteurs média libres, des jeux libres – des milliers. Certaines régions ont adopté GNU/Linux dans leurs écoles publiques. Maintenant il nous faut convaincre le reste du monde d’en faire de même.

Que considéreriez-vous comme vos échecs les plus significatifs, ou dans quels domaines auriez-vous souhaité faire plus de progrès  ?

Le plus grand échec du mouvement des logiciels libres est ironique  : notre logiciel libre et devenu si attirant pour les geeks que l’usage et le développement de logiciels libres se sont beaucoup plus répandus que l’appréciation de la liberté sur laquelle le mouvement se fonde. Le résultat est que nos points de vue en sont venus à être considérés comme excentriques dans la communauté que nous avons construite.

Dans quelle mesure c’est un échec personnel, je ne le sais pas. Je ne sais pas si j’aurais pu éviter cela en agissant différemment.

Quels avantages naturels (cognitifs, émotionnels, dans votre style de vie, etc.) pensez-vous voir en tant qu’activiste  ?

Mes plus gros avantages, autres que ma capacité naturelle en tant que programmeur, sont la persévérance et la détermination, ainsi qu’un sens du défi plein d’insolence et de moquerie qui me permet de faire des choses qui ne sont vraiment pas difficiles, mais devant lesquelles d’autres se déroberaient peut-être.

La plupart des gens semblent supposer que si on vous éloigne de la victoire alors on abandonne. Cela n’a aucun sens pour moi. Quel intérêt pourrait-il bien y avoir à laisser tomber  ? Rien de ce que je peux imaginer réussir dans le monde n’est plus important que la défense des droits de l’homme. Tant que mes chances de victoire sont plus grandes si j’essaie que si j’abandonne, il serait absurde de laisser tomber.

Un autre avantage semblerait être que vous faites preuve d’une énorme résistance face aux critiques ou même aux railleries. On s’est moqué de vous pendant des années à propos de points de vue qui sont maintenant considérés comme valides et même majoritaires. Peu de gens savent s’accommoder de ce genre de critiques ou de railleries intenses. Est-ce que cela vous a été difficile, et si vous avez un mécanisme pour vous en accommoder, quel était-il  ?

Tout ce que ces railleries disent vraiment, c’est «  nous sommes plus gros que vous, nananère  !  » Le but est d’intimider les insoumis, et le moyen de contrecarrer ceci est de refuser de se laisser intimider.

Parfois tous les insoumis sont intimidés, sauf un. Cela m’est arrivé plus d’une fois. C’était décourageant jusqu’à ce que j’ai appris à me souvenir que d’autres sont probablement du même avis, même s’ils ne le disent pas tout haut, donc dans les faits je suis leur porte-parole. Je me rends aussi compte que beaucoup d’autres, qui sont indécis, écoutent probablement en pesant les arguments. Rien qu’en restant sur ma position, en restant calme, et en réfutant les arguments des adversaires sans rancœur, je peux en rallier quelques-uns. Bien sûr, il est plus simple de rester calme par e-mail qu’en tête-à-tête, j’essaie donc d’avoir ces débats par e-mail. Une liste de diffusion est aussi susceptible de toucher un plus grand nombre d’indécis que je pourrais peut-être rallier.

Par contraste, dans une discussion en privé j’ai appris à ne pas perdre de temps à écouter les railleries. À la place, je fais quelque chose de plus utile, ce qui est d’habitude également plus agréable.

Quels défauts naturels avez-vous dû compenser ou vaincre  ?

Mon principal défaut est une tendance à perdre mon sang-froid. Mais j’ai trouvé un moyen de contrôler cela la plupart du temps  : je relis et je réécris mes e-mails avant de les envoyer.

Beaucoup d’activistes ont du mal à décider quels projets ou tâches entreprendre. Beaucoup font le mauvais choix, perdent du temps et compromettent leur efficacité. Comment décidez-vous des projets ou tâches à entreprendre  ?

J’ai essayé de me demander à quels problèmes était confrontée la communauté, et ce que je pouvais faire pour changer la situation.

Quelles autres erreurs voyez-vous des activistes faire qui compromettent leur efficacité  ?

Je trouve que de nombreux techos qui veulent soutenir le mouvement ne pensent qu’en termes de ce qu’ils peuvent faire seuls dans leur coin. Il ne leur vient pas à l’esprit de chercher des alliés pour agir avec plus de force.

Cependant, d’autres qui se trouvent apprécier les idées du mouvement du logiciel libre sont découragés par la taille de la tâche qui pourrait demander des années de travail, et abandonnent avant la première étape. Ils perçoivent une telle tâche comme impossible à surmonter, sans prendre en compte que nous avons déjà surmonté des tâches bien plus dures.

Quels sacrifices personnels avez-vous fait pour votre activisme  ? En regardant en arrière, comment est-ce que vous les percevez  ?

Je travaille dur, mais je n’appellerais pas cela un sacrifice. Comment pouvez-vous réussir quelque chose d’important sans travail  ? La plupart des gens travaillent dur pour des choses qui n’en valent pas vraiment la peine.

Je me passe de certaines choses que l’on apprend à désirer à la plupart des Américains  : je n’ai jamais eu une maison, une voiture ou des enfants. Mais je ne le regrette pas. Si vous avez ces choses, elles font de votre vie un combat désespéré pour pouvoir vous les payer. Souvent les hommes divorcent, après quoi c’est à peine s’ils arrivent à voir les enfants pour la subsistance desquels ils doivent se démener toute leur vie.

Quel gâchis de se battre toute sa vie pour pouvoir se continuer à se battre. C’est en rejetant ces lourds fardeaux que j’ai pu combattre pour quelque chose qui vaut ce combat.

Quels bénéfices personnels avez-vous tiré de votre activisme  ?

Je passe le plus clair de mon temps à voyager là où l’on m’a invité à donner des conférences. Par certains aspects, c’est très agréable – je vois beaucoup de pays, je visite des endroits beaux et intéressants, j’essaie de nombreuses nourritures, j’écoute de nombreux styles de musique, et je me fais des amis. Il y a aussi des mauvais côtés  : les voyages en avion prennent du temps, la sécurité est fascisante, et je ne peux suivre aucun cours parce que je ne suis pas assez longtemps à la maison.

Quel conseil donneriez-vous aux activistes qui voudraient avoir plus de réussite ou d’efficacité  ?

Restez concentrés sur la façon de changer l’avenir. Ne vous reposez pas sur le passé sauf pour tirer les leçons sur le moyen d’être plus efficace à l’avenir. Ne perdez pas de temps à des gestes symboliques, ne mettez pas plus de la moitié de vos efforts dans des actions qui sont efficaces mais qui ne véhiculent aucun message. Dans l’idéal chaque action devrait créer une brèche dans le problème, et aussi inspirer les autres.

Quel est le meilleur moyen pour quelqu’un qui n’a pas beaucoup de temps ou d’argent pour aider le mouvement du logiciel libre ou tout autre mouvement à soutenir  ?

Vous pouvez soutenir le mouvement du logiciel libre avec une petite somme d’argent, en devenant membre de la Free Software Foundation. Vous pouvez soutenir le mouvement en donnant un petit peu de temps, en vous inscrivant sur DefectiveByDesign.org pour participer à nos protestations contre les mesures de gestion numérique du droit d’auteur (DRM). Cela fait référence à la pratique qui vise à développer des produits pour restreindre les droits de l’utilisateur.

Vous pouvez aussi aider en économisant du temps et de l’argent, en n’achetant pas des médias que vous n’avez pas la possibilité de copier. N’achetez pas de BluRay ni de HD-DVD. N’achetez pas de lecteur de livre électronique comme le Swindle d’Amazon (NdT  : jeu de mot avec le Kindle signifiant escroquerie) ou le Sony Reader. N’achetez pas de musique ni de films dans des formats cryptés. Insistez pour n’avoir que des médias sans restrictions.

Si vous n’étiez pas programmeur ou activiste du logiciel libre, quelle autre profession auriez-vous aimé embrasser  ?

J’aurais apprécié faire de la recherche en physique. Tout comme j’aurais aimé faire du stand-up (NdT  : du one-man-show comique cf Wikipédia). Quant à savoir si j’ai la capacité de faire l’un ou l’autre, qui sait  ?

Du stand-up  ! Quelle est votre blague préférée  ?

Je n’ai pas de blague préférée, de plat préféré, de livre préféré, ou de quoi que ce soit préféré. J’ai besoin de notes pour me rappeler de toutes les blagues que je pourrais raconter si les circonstances me les rappellent. Et si je pouvais me souvenir de toutes, j’aurais du mal à les comparer pour en choisir une préférée.

Mais il me revient ce à quoi j’ai pensé aujourd’hui, en un éclair, quand c’était utile. J’ai fait un bilan médical, et le docteur m’a dit «  Bon pour le service  !  ». J’ai répondu «  Quel service  ? On n’a même pas de service de santé  !  »

Notes

[1] Crédit photo  : Mlinksva (Creative Commons By)

17 Responses

  1. Loïc Fejoz

    Il faut par ailleurs noter qu’ils sont amis et que Richard Stallman recommande d’ailleurs le livre d’Hillary Rettig sur sa page web.
    Le livre /The Lifelong Activist/ est effectivement très intéressant. A quand une traduction française ? 😉

    cf http://lifelongactivist.com/

  2. Marc F.

    Intéressant. Il y a des propos qui sont de véritables petits conseils à la jeunesse qui souhaiterait militer ou développer dans le logiciel libre. Sacré bonhomme.

  3. deadalnix

    Je ne rejoins pas toujours Stallman dans ces déclaration Particulièrement quand il oppose open source et logiciel libre, qui sont pour moi deux façon de voir la même chose, deux visions qui ne sont pas antinomiques. Ceci dit, je rejoint le personnage dans bien des domaines.

    Mais c’est presque toujours intéressant à lire. C’est quelqu’un qui a une réflexion profonde sur bien des sujets, qui font que, même si l’on ne partage pas son avis, confronter le notre au sien dans un exercice de pensée nous fait souvent progresser.

    Et encore une fois on en a la preuve.

  4. Bruno

    Merci pour la traduction de cet entretien. (Il y a une petite inversion amusante kindle/swindle à corriger).
    Le point le plus intéressant est la réflexion sur le plus grand échec du mouvement des logiciels libres. Et je suppose que RMS a modéré son propos lorsqu’il parle de points de vues considérés comme "excentriques". J’ai la désagréable impression que la tendance actuelle est au dénigrement systématique des défenseurs de la philosophie du libre (au sens de la GPL) qui se font régulièrement qualifier d’intégristes, de barbus et d’autres noms charmants 😉

  5. Valentin Villenave

    @deadalnix: La distinction entre "free" et "open" est loin d’être vide de sens, même si les barrières sont plus floues qu’une simple distinction sémiotique. Il est à ce titre extrêmement intéressant, par exemple) de comparer des interviews de Linus Torvalds avant 1998 (où il n’hésitait pas à évoquer la transmission de la connaissance, les libertés civiques etc.) et aujourd’hui (où il tient un discours beaucoup plus "corporate", jouant à fond le rôle du technicien-qui-ne-se-préoccupe-pas-de-politique).

    @Bruno: Pour prendre le débat sous un autre angle, je suis tombé il y a quelques jours sur cet éditorial du patron de la New Zealand Open Source Society (donc, Open Source, corporate à fond etc.), qui apporte un point de vue inattendu et (apparemment) judicieux : il faudrait, tout simplement, arrêter de considérer le simple mot de "liberté" comme une dangereuse-utopie-gauchiste.

    http://computerworld.co.nz/news.nsf
    "Pour une raison qui m’échappe, le terme de "liberté" a mauvaise presse, comme si l’on devait voir en quiconque aspire à être libre un dangereux illuminé dépourvu de toute capacité à appréhender la vie de façon rationnelle et pragmatique.
    Voici quelques raisons pour lesquelles de véritables entrepreneurs, qui fabriquent de véritables richesses, voient en la liberté quelque chose d’important : […]
    Pris dans ce contexte, "liberté" s’avère être un mot tout à fait rationnel, et nous ne devrions pas entre être étonnés."

  6. PillOow

    Je plussoie complétement RMS dans sa vision du plus gros echec de la communauté.

    J’aime d’abord le logiciel libre, puis Gnu/Linux ensuite, et je suis triste de constater que beaucoup de gens aient choisi ce système pour des raisons purement techniques, ou même par mode. L’installation de logiciels propriétaires est possible sur cette plateforme, certains modules du kernel sont proprios. Projetons nous dans un peu plus loin dans l’avenir, voici une des issues possibles:

    S’il y a plus d’utilisateurs de Gnu/Linux que de Windows users, il y aura peut-être plus de choix en logiciels proprios qu’en logiciels libres. Les gens pourront choisir, mais la politique des logiciels propriétaires appelle à la domination par l’enfermement des utilisateurs avec, par exemple, l’utilisation de formats proprios. Tot ou tard, les gens qui auront choisis les logiciels propriétaires pour des raisons purement techniques, se feront "accrocher" par l’éditeur. Impossible alors de passer par un autre logiciel pour la lecture des documents générés. Alors, à quoi bon utiliser Gnu/Linux si c’est pour n’utiliser qu’en grande partie du logiciel propriétaire et en être dépendant. Le projet GNU est né pour apporter une alternative libre aux gens, par pour nous donner un Unix "gratuit".

    Il faut véritablement que les gens prennent conscience des libertés qu’ils cèdent lorsqu’ils utilisent du logiciel propriétaire et de ce que peut leur apporter des solutions libres avant que notre société toute entière soit numérisé.

    Aujourd’hui, Windows est effrayé par Gnu/Linux, j’espère que demain, la seconde phase soit que Microsoft soit effrayé par le logiciel libre. Alors la véritable guerre débutera, il ne sera plus seulement question de concurrence ou de marché, mais de liberté.

  7. ZondeR

    Je ne plussoie pas complétement RMS dans sa vision du plus gros echec de la communauté.

    Si effectivement, l’objectif est la liberté et si c’est "l’admiration de la liberté" qui a créé le mouvement des logiciels libres, leurs succès technique est tout de même un excellent porte-parole: leurs utilisateurs beaucoup plus réceptifs.

    Le premier jour, on utilise un logiciel qui est bien.
    Le deuxième, on apprend qu’il n’est pas gratuit, mais libre.
    Le troisième, on comprend pourquoi il est si bien et on soutient le mouvement.

  8. PillOow

    Désolé d’être pessimiste mais ça ne ce passe pas toujours comme ça. C’est justement ça le problème, beaucoup trop de monde s’arrête au deuxième jour. On apprend qu’il est libre mais on ne soutient pas le mouvement, du moins du point de vue éthique, alors qu’il est le plus important.

    Et même soutenir sans forcément soutenir le mouvement, ce ne fera pas arr?ter les gens d’utiliser du logiciel propriétaire. Combien de personnes utilisant une distribution Gnu/Linux utilisent encore Adobe Flash Player sur leur browser ? A cela on va me repondre: "Oui mais les solutions libre pour la lecture Flash sont à chier"

    Celui qui répond cela est pret à abandonner un peu de liberté pour des raisons techniques.

  9. JosephK

    @ZondeR : et le septième jour on se repose ? 😛

    Sérieusement, c’est clair que c’est décevant quand on prend le temps d’expliquer quels sont les enjeux éthiques derrière le logiciel libre et qu’en retour l’interlocuteur répond qu’il est d’accord sur le principe mais qu’il préfère un logiciel "confortable" (qu’il soit "privateur" ou non) à un logiciel "libre".
    Comme les logiciels libres sont de plus en plus confortables alors effectivement on a une transformation des "utilisateurs de logiciels" en "adeptes du libre" après ces "3 jours".
    Le problème c’est qu’on ne sais plus si c’est "la liberté" ou "le confort" qui motive la communauté.

  10. deadalnix

    Valentin Villenave :

    Bien sur qu’il y a une différebnce entre libre et ouvert.

    Maintenant, pourquoi ces deux notion devraient être opposées ?

  11. Etenil

    Je pense que la traduction est biaisée à:

    "Quel gâchis de dédier sa vie à un combat pour sa survie."

    Cela devrait plutôt être:

    "Quel gâchis de se battre toute sa vie pour pouvoir se continuer à se battre."

    RMS montre ici l’absurdité du modèle de vie américain et consommateur.

  12. BG

    Utiliser un logiciel proprio sur sa distribution linux c’est aussi la liberté de choix !
    Si un jour des logiciels propriétaires arrivent sur Linux, je pense que ça sera bénéfique dans le sens où il sera plus facile pour certains de venir vers ce système d’exploitation et ainsi découvrir petit à petit l’univers.
    J’avais des habitudes quand j’ai démarré sous Ubuntu, j’utilisais encore certains logiciels avec windows en dual boot. Aujourd’hui je n’utilise que du libre et je m’en porte très bien ! 😉
    Le libre c’est aussi ça, respecter la liberté des utilisateurs à mon avis.

  13. PillOow

    Bien sur qu’un utilisateur a le droit de choisir d’utiliser un logiciel propriétaire sur une distribution Gnu/Linux ou tout autre système. Il a parfaitement le droit de choisir d’utiliser un logiciel qui le privera de libertés fondamentales pour des questions purement techniques. Oui il peut, et s’il le fait c’est qu’il se moque de perdre ces libertés si importantes.

    Je n’ai jamais dit qu’il était question d’interdire l’user d’utiliser un soft proprio sur une distrib Gnu/Linux. La question a longuement été débattue, chacun conserve sa propre opinion sur ce sujet. Je pense pour ma part qu’effectivement la possibilité d’utiliser des logiciels proprios sur les Gnu, comme le flash player par exemple, a été bénéfique pour la communauté. Celle-ci s’est agrandie. Mais l’idéologie n’est pas ce qui a attiré l’utilisateur en premier lieu. Soit, pour l’instant, ça n’est pas un mal. Puisque celui-ci a pu jouir de plus de libertés étant donné que la proportion logiciel libre/proprio s’inverse presque par rapport à l’époque ou l’user faisait l’usage de Windows. Mais à l’avenir, si Windows ne détient plus le monopole et que Gnu/Linux occupe une place importante sur le marché, la proportion soft libres/proprio sur Gnu/Linux risque de s’inverser. L’utilisateur étant dès le départ submergé par les offres de logiciel proprios sur cet OS, il risque de retomber fatalement dans la spirale infernale du logiciel privateur s’il ne considère pas la question de sa liberté. Ce sera un echec totale parce que le but n’est pas la domination d’un système ou d’un éditeur en particulier, le but est que tout les logiciels soient libres. Ce but ne sera pas atteint sans une prise de conscience collective.

    Evidemment, je parle de l’utilisateur Lambda, beaucoup d’entre vous ici sont sensibilisés aux logiciels libres que ce soit avant, après ou même sans une reconversion Windows -> Linux. Je pense que nous ne sommes malheureusement qu’une minorité à avoir saisi les enjeux du logiciels libres en les utilisants à la fois. Notre expérience n’est nullement général. Tout le problème est là.

    En clair, le but du projet Gnu ( fournir un système libre ) pourrait être un echec presque entier,
    . Gnu/Linux demeura à jamais libre mais il pourrait devenir un nid de logiciels privateurs si la place qu’il occupe sur le marché devient si importante que les éditeurs de ces derniers mettraient autant d’efforts pour s’y déployer qu’ils le font sous Windows aujourd’hui. Le sort du projet Gnu dépendra essentiellement de la capacité qu’ont les gens de prendre conscience de l’importance de la liberté face au confort.

    C’est un scénario catastrophe tout droit sortie de mon imagination, mais il me semble plausible, et de toute façon, même si le Cloud computing va certainement modifié le paysage informatique du futur que j’imagine dans ce commentaire, le but et les moyens restent les mêmes. Heureusement il y a une petite lueur derrière tout ça, c’est qu’à mesure que la communauté s’agrandit, le nombre de dev libristes augmente presque proportionnellement. Rendant peut-être ces pronostiques improvisés, sur la proportion logiciels libres/proprios, incertains. Mais il faut toujours garder à l’esprit qu’un echec est possible, le pessimisme est parfois la meilleur attitude à adopté pour gagner.

  14. deadalnix

    PillOow :

    Votre point de vue est très simplificateur. Les choses ne sont pas toujours si noires et blanches. Avoir un tel point de vue vous désert.

  15. Grunt

    @PillOow.

    <<t même soutenir sans forcément soutenir le mouvement, ce ne fera pas arr?ter les gens d’utiliser du logiciel propriétaire. Combien de personnes utilisant une distribution Gnu/Linux utilisent encore Adobe Flash Player sur leur browser ? A cela on va me repondre: "Oui mais les solutions libre pour la lecture Flash sont à chier"
    Celui qui répond cela est pret à abandonner un peu de liberté pour des raisons techniques.>>

    Et si je te disais que je déteste utiliser du proprio, justement pour des raisons techniques?
    Se dire "utiliser du proprio est plus facile techniquement" est une vision à courte vue: l’utilisateur se pose en tant qu’objet passif dans un monde immuable technologiquement. C’est partir du principe qu’il y aura toujours du matos avec des blobs binaires, toujours du Flash sur le Web, toujours des gens sur MSN.

    Pourtant, en prenant du recul, on se rend compte que s’il est "facile" de passer au libre dans certains domaines, c’est parce que des galériens sont passés avant nous, même si pour eux c’était moins facile. Mais ils l’ont quand même fait!!

    Si aujourd’hui des softs proprios apparaissent pour Linux, si les FAI, les services, les éditeurs, les fabricants commencent tout doucement à prendre en compte "l’utilisateur particulier sous linux", c’est parce que l’utilisateur a râlé, l’utilisateur a fait comprendre qu’il ne sera pas question pour lui d’abandonner Linux, et que si tel ou tel truc n’est pas dispo sous Linux, il fera sans au lieu de passer à Windows.

    Cette attitude "Je tiens à utiliser du libre" manque un peu: les gens qui ont cette attitude "stallmanienne" sont toujours là, mais dilués dans une foule qui est prête à repasser sous Windows si aMSN ne se connecte plus.

    Pourtant, le libre, tant au niveau des pilotes (marre des blobs binaires!) que des services (marre des MSN et autres Facebook!) ne progressera sur tous les fronts que si les utilisateurs de maintenant cessent de réclamer "On veut du proprio sur Linux" mais plutôt "On veut que ce soit libre."

    Et c’est en faisant progresser, non pas du "proprio compatible Linux", mais du "ce que vous voulez compatible avec du libre" que le libre deviendra plus facile à utiliser.

    C’est "plus simple" d’utiliser une carte nVidia avec ses pilotes libres que proprios. Mais si les linuxiens cessaient d’acheter du nVidia, et que le marché des linuxiens prennait de l’importance, nVidia se démerderait pour avoir des pilotes libres. Et le résultat c’est qu’il serait encore plus simple qu’actuellement d’utiliser du nVidia.

    Voyons à long terme! C’est un certain "égoïsme" que de se satisfaire du mélange libre/proprio actuellement dispo et de se dire "Ah, ce service/logiciel/matériel est proprio, mais c’est compatible Linux, donc je prends", car ça favorise un status quo qui nuit à la progression du libre ET à sa facilité.

    Les jonctions proprio/libres sont en général le plus gros problème rencontrés par les utilisateurs de logiciels libres: MSN-clients libres, Linux-Flash, Linux-pilote proprio, OpenOffice-.doc.

    Et ces problèmes persisteront et donneront du libre une image de "truc qui marchouille mais faut bidouiller", tant que la majorité des utilisateurs de "Linux" n’auront pas appris à être intransigeant.

    "Oui, je peux lire ton .doc avec OOo, mais je refuse de le faire. Si suffisamment de monde refuse les .doc, Microsoft sera obligé d’adopter un format ouvert, et les choses seront plus faciles qu’elles ne le sont maintenant."

    "Oui, je peux installer Flash pour voir ton site, mais je refuse de le faire. Si suffisamment de gens refuse d’installer Flash, les webmasters seront obligés de proposer un contenu alternatif et ne pas utiliser flash ne sera plus un gros problème."

    "Oui, je peux te rejoindre sur MSN depuis Linux, mais je refuse de le faire. Si suffisamment de gens quittent MSN, soit jabber deviendra le standard de fait, soit Microsoft se rendra compatible avec Jabber, donc ce sera plus simple de discuter."

    Entre le "un peu compliqué" et "très compliqué", le premier choix est tentant. Mais c’est le deuxième qui ouvre la porte du "pas compliqué du tout", alors que le second amène la stagnation voire la régression: les gens qui ont installé Flash 7 l’ont eu bien profond quand ils ont découvert que Flash 8 n’allait pas être porté sous Linux. Ça avait l’air d’être "simple" de l’installer, pourtant ;+)

    "If it looks like it will be hard to resist tomorrow, you should resist today, even if it looks like it will be hard to resist today, it’s easier." R.M. Stallman.

    "S’il semble que résister demain sera difficile, vous devriez résister aujourd’hui, car bien que ça semble difficile de résister aujourd’hui, c’est maintenant que c’est le plus facile." (traduction libre).