Les enfants Montessori et le logiciel libre partagent de nombreux points commmuns

Classé dans : Éducation, Mouvement libriste | 15

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Brian Glanz - CC by-saNée dans un quartier pauvre de Rome il y a plus d’un siècle, l’originale pédagogie Montessori n’a jamais cessé d’essaimer et connaît même un fort regain d’intérêt à l’aube de ce nouveau millénaire qui nous demande une solide capacité d’adaptation aux changements.

Les fondateurs de Google ont été dans une école Montessori. Et le créateur du cèlèbre jeu SimCity en parle en ces termes  : «  Montessori m’a enseigné la joie de la découverte. Cela m’a montré que l’on pouvait s’intéresser à des théories complexes, comme celles de Pythagore par exemple, en jouant avec des cubes. Il s’agit d’apprendre pour soi-même plutôt que de recevoir l’enseignement du professeur. SimCity est directement issu de Montessori – si vous donnez aux gens ce modèle de construction des villes ils en tireront les principes de l’urbanisme  ».

Michael Tiemann, figure du logiciel libre travaillant chez Red Hat mais aussi jeune papa, tente ici de rapprocher les deux domaines parce qu’il y voit de nombreux points communs. L’une de ses hypothèses est qu’un enfant qui aura suivi une méthode Montessori sera plus à même de comprendre, s’intéresser et s’impliquer dans le logiciel libre[1].

Par extension et extrapolation, sera-t-il plus à même de comprendre, s’intéresser et s’impliquer dans le monde d’aujourd’hui mais surtout de demain  ?

Remarque personnelle  : Je constate que de plus en plus de parents «  bobos de gauche urbains  » placent leurs enfants dans des écoles privées Montessori, pour l’épanouissement général de l’enfant mais aussi pour échapper à la carte scolaire et l’école publique du quartier.

Montessori et la voie de l’Open Source

Michael Tiemann – 12 août 2011 – OpenSource.com
(Traduction Framalang  : ZeHiro et Mammig2)

Montessori and the open source way

J’ai lu avec grand plaisir l’article de Steve Denning «  Montessori est-il à l’origine de Google et Amazon  ?  ». Son argumentaire est solide, il s’appuie sur de nombreux faits scientifiques, et il expose les résultats remarquables que l’on peut obtenir quand nous pouvons Faire confiance à l’enfant. Il écrit si bien et de façon si claire qu’il est inutile que je répète ses propos, vous pouvez (et devriez  !) lire directement son article. Mais nous pouvons le compléter, en particulier en comprenant comment les principes et la philosophie de l’open source sont si proches de la méthode éducative de Montessori.

C’est en tant que parent, et assez tardivement, que j’ai découvert l’éducation Montessori. Au début, je ne connaissais strictement rien aux travaux de Montessori, mais l’école de ma fille prenait très au sérieux ses écrits et j’ai ainsi commencé à voir les liens profonds et étroits entre des activités scolaires en apparence simples. Après avoir lu La science derrière le génie, le schéma complet m’est apparu plus clairement, et depuis je suis devenu un fervent partisan de la méthode Montessori.

La thèse Faire confiance à l’enfant, développée par Montessori, repose sur l’idée d’accompagner le développement de l’individu. Montessori a montré que lorsque des enfants sont privés de la possibilité de faire leurs propres choix, alors leur personnalité ne se développe pas complètement, et ils peuvent dépendre beaucoup trop des autres pour prendre des décisions les concernant. Par analogie, l’open source permet à tous les participants, qu’ils soient utilisateurs, développeurs, distributeurs ou mainteneurs de devenir de vrais contributeurs. Cette opportunité encourage non seulement à améliorer le logiciel (dont la qualité peut être perçue comme 100 fois supérieure à celle des logiciels propriétaires), et le plus important est qu’il encourage également les individus à s’améliorer. C’est ce que j’ai pu constater en étant dans l’open source depuis plus de vingt ans et en tant que parent Montessori depuis dix ans.

“Faire confiance à l’enfant” ne se limite pas à observer ce que fera un enfant dans le cadre d’un programme éducatif imposé. Dans l’éducation Montessori, tout l’environnement est disponible pour étudier, et les enfants sont encouragés à passer du temps à l’extérieur, pour observer, inventorier, s’interroger, et chercher les connaissances nécessaires pour répondre à leurs questions. La démarche scientifique est modulaire et évolutive, c’est à dire que des résultats sont obtenus à partir de résultats qui proviennent eux-mêmes d’autres résultats.

Ces résutats scientifiques doivent être reproductibles ou bien ils ne sont pas scientifiquement acceptables. De façon similaire, la modularité naturelle des logiciels open source fait qu’ils deviennent eux-même une forme de science de la programmation. Les modules peuvent être aussi librement utilisés que les résultats scientifiques peuvent être librement reproduits. Et tout comme un grand scientifique essayera de rendre ses résultats aussi simples et accessibles que possible, il existe une forme de reconnaissance similaire pour ceux qui écrivent des logiciels qui sont le plus possible généralistes, portables, et techniquement transparents.

Une valeur primodiale de la méthode Montessori est que l’apprentissage devrait être l’affaire de toute une vie. Denning paraphrase ceci en disant que l’éducation n’est pas une destination mais un voyage. Denning observe également que ceux qui voient dans l’obtention de leurs diplômes universitaires le boût du chemin, se retrouvent dans une impasse en cas de changement. Pour ceux qui envisagent l’apprentissage comme un exercice de longue haleine, alors le changement est simplement une nouvelle opportunité d’apprendre. De la même façon, les logiciels open source ont tendance à avoir un avenir ouvert et en perpétuel développement. De nombreux logiciels et frameworks propriétaires s’élèvent puis chutent car ils sont conçus avec une idée d’achèvement. Au contraire, les logiciels open source sont constament re-écrits, re-inventés et leurs objectifs modifiés. En regardant l’évolution de Linux au court des vingt dernières années je me suis dit  : a-t-il déjà existé un système d’exploitation qui ait autant évolué, aussi rapidement et soit allé aussi loin  ? Voilà tout le génie d’une vision de l’apprentissage à long terme.

Un dernier point  : Les enfants Montessori sont-ils enthousiastes à l’idée de mettre les mains dans le code source  ? La réponse evidente vous fournira, s’il en était besoin, une ultime preuve des atomes crochus entre Montessori et l’open source.

Notes

[1] Crédit photo  : Brian Glanz (Creative Commons By-Sa)

15 Responses

  1. vvillenave

    Faire du pognon sur la crédulité des parents, ça n’a pas de prix… Pour tout le reste, il y a MasterCard®.

  2. sishu

    @idoric : Je crois qu’il veut parler des frais de scolarité à Montessori. Comme toutes les écoles privées, ça coûte un max….

  3. Philippe

    Oui ce sont les écoles privées qui s’en sont saisie. Il me semble qu’on trouve dans l’enseignement public des établissements appliquant la méthode Freinet http://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A… qui n’est pas trop éloignée de celle de Montessi . Perso si je pense que ces méthodes peuvent convenir à certains enfants, je ne crois pas que l’on puisse les appliquer à tous…. Mais ne jetons pas le bain du bébé et… le bébé.

  4. GMR

    «Il s’agit d’apprendre pour soi-même plutôt que de recevoir l’enseignement du professeur. SimCity est directement issu de Montessori – si vous donnez aux gens ce modèle de construction des villes ils en tireront les principes de l’urbanisme »

    Bah ouai, sauf qu’ils mettront des décennies à redécouvrir ce que d’autres (« professeurs ») auront préalablement capitalisé (connaissances issues de l’observation des urbanismes sur plusieurs siècles).

    À supposer que les « règles » codées dans simcity soient un reflet fidèle de la réalité. Léger détail.

    Qu’est-ce qu’il ne faut pas lire quand même…

  5. Xurion

    C’est presque déprimant de voir que cette méthode n’est appliquée que par les écoles privées dans nos pays développés alors qu’à l’origine elle était prévue pour les pauvres.

    Il n’y a plus qu’à changer la vapeur en proposant cela en cours parallèles basés sur cette méthode ^^ (via des asbl, loi 1901, etc)

    Car si l’on attend l’administration et ses inspections scolaires qui font marche arrière, ça ne va pas percer de suite :/

    En tout cas, j’aime beaucoup ce concept et le rapport à la vie des logiciels. En définitive, on pourrait dire que l’école actuelle propose des diplômes à l’obsolescence programmée ? C’est assez aberrant quand même que même l’être humain commence ainsi à être pris pour de la marchandise (on paie un diplôme !).

    PS : il y a une coquille à la fin du 3ème paragraphe de la traduction car il faut y lire « dix » 😉

  6. Amaury

    Si j’ai vu si loin, c’est que j’étais monté sur des épaules de géants. – Isaac Newton
    C’est fou cette propension qu’il y a a vouloir toujours réinventer la roue. Ca peut quelquefois être utile mais (en parlant logiciel libre) on ne va pas forcément refaire une pile graphique tous les quatre matins.
    La pile graphique n’est peut-être pas le meilleur exemple…

  7. paroless

    Merci pour ce rapprochement (qui n’est pas qu’a faire avec l’open source d’ailleurs).
    Ce que google, wikipédia ou d’autre en ont retenu est un très long débat (intéressant). À coté de cela il y a des centaines d’adultes issus d’écoles Montessori qui font des choses très différentes les uns des autres et qui ne sont pas répertorié.
    Je suis en train de me débattre avec mes premières pages de codes pour… monter un blog sur les ateliers Montessori que je propose, c’est dire si je suis en plein dedans.
    J’ai les poils qui se hérissent quand je lis le premier commentaire, ne serait-il pas possible de lire des choses plus constructives que des jugements hâtifs qui passent mieux sous le couvert d’une bonne blague?
    Si les écoles privées Montessori sont chères c’est parce qu’elles ne reçoivent pas d’aide de l’état, pas parce que les enseignants s’en mettent plein les…! La scolarisation des enfants dans le public aussi coûte cher mais nous ne le voyons pas car à la fin du mois la facture ne tombe pas sur notre bureau.
    J’imagine que l’auteur de ce commentaire travaille et touche une rémunération à la fin du mois, les enseignants Montessori aussi.
    J’ai visité une école Montessori dont les enseignants ne se payait pas pour permettre à plus de parents de payer, je trouve ça très courageux mais ne comprend comment on pourrais l’exiger de qui que ce soit!

  8. bouts

    Le sujet interpelle en cette veille de rentrée scolaire 🙂

    @Xurion « C’est presque déprimant de voir que cette méthode n’est appliquée que par les écoles privées dans nos pays développés alors qu’à l’origine elle était prévue pour les pauvres »
    Comme dit plus haut, en France il y a des écoles publiques basées sur la pédagogie Freinet, et plus généralement, des enseignants [1] de l’école publique appliquent cette pédagogie. De même, certains principes font partie intégrante du système d’enseignement (je pense notamment aux classes de découvertes – classe verte).
    Il y a 4 ans, le 1er collège-lycée Freinet a vu le jour à La Ciotat (et une raison pour y habiter 🙂
    http://www.laprovence.com/article/f

    @Philippe « Perso si je pense que ces méthodes peuvent convenir à certains enfants, je ne crois pas que l’on puisse les appliquer à tous… »
    Rabelais disait « L’enfant n’est pas un vase à remplir mais un feu à allumer », et c’est là tout un héritage d’éducation humaniste dont s’inspire Freinet et bien d’autres courants pédagogiques.
    On donne les moyens à l’enfant de construire ses connaissances. Il trouve ses propres cheminements, dans un contexte qui lui est favorable (avec un enseignant aimant si possible :-),
    Il pourra ainsi élaborer ses propres stratégies cognitives qu’il pourra reproduire[2]. Apprendre à apprendre (métacognition), et non à répondre à un stimuli pavlovien (j’ingurgite, contrôle, je régurgite ce qui n’est pas sans rappeler le ridicule et le danger des évaluations binaires mises en place dernièrement et qui ne sont en rien représentatives des connaissances de l’enfant – et encore moins source d’épanouissement ou d’émancipation – m’enfin, ça n’est certainement pas ce qui est recherché…)
    Peut-on penser qu’une pédagogie qui redonne à l’enfant une place d’élève-citoyen-acteur-auteur n’est pas faite pour tous les enfants?

    Par contre, j’aurais tendance à être d’accord concernant *certaines* (je souligne pour qu’on ne me tombe pas dessus) écoles Montessori (et certaines écoles « nouvelles ») en *France* qui prennent ancrage dans un rejet total du système dit traditionnel, ce qui, à mes yeux, relève d’une position rigide contraire à la mission que ces écoles se donnent. Contrairement à ces prises de position exclusives, je préfère une démarche qui sait dépasser « les couples d’opposition », décriés par Bourdieu – auxquels Dewey a consacré des travaux, repris par Freinet -, tels démocratie versus discipline, plaisir versus effort etc. afin de trouver une articulation. La liberté ne signifie pas absence de rigueur…
    Je rejoints l’avis de vvilenave concernant la crédulité des parents: il n y a pas de méthode magique, même si la société moderne est vorace de recettes prêtes à l’emploi épargnant toute réflexion. Les situations d’apprentissage scolaires sont d’une grande complexité à appréhender sous plusieurs angles, théoriques et pratiques. Ceci implique la prise en compte de l’histoire des sciences de l’éducation et des apports de la recherche.

    Je critique *certaines* écoles, et non la pédagogie Montessori qui s’inscrit dans une même dynamique de pédagogie active.
    Même si, perso,j’ai quelques réserves, notamment, concernant la place donnée aux activités artistiques : par exemple, la pratique du dessin est envisagé comme outil de la préparation de la main à la graphie – pourquoi pas ? Mais j’y vois une certaine vision limitative. Après, il est certain qu’il faut se replacer dans le contexte de l’époque et de la population concernée pour comprendre les choix de Maria Montessori. Et là encore, certains partisans contemporains reprennent des principes en les décontextualisant et en les vidant de leur substance, pour ne retenir qu’une méthode-miracle.

    #Amaury, tu ne crois pas si bien dire, un extrait d’une revue pédagogique de 1925 :
    http://hmenf.free.fr/rubrique.php3?…
    « Les découvertes de la psychologie et de la pédagogie expérimentales tendent à prouver partout que l’éducation n’a pas à former les enfants (ce qui veut dire le plus souvent les déformer), mais à leur procurer le milieu où ils puissent se développer dans les conditions les plus favorables. Les expériences ont démontré que c’est dans une atmosphère de libre activité que ce développement se fait le mieux, et que les enfants atteignent ainsi un niveau physique, intellectuel et moral très supérieur à celui que leur permettent d’atteindre les méthodes actuellement en faveur. De même que l’hygiène moderne a rejeté les maillots par lesquels on déformait autrefois le corps des bébés, de même l’éducation nouvelle rejette les contraintes ou la sollicitude excessive par lesquelles on a déformé jusqu’à nos jours les facultés intellectuelles et morales de nos enfants. L’enfant est un être particulier, doué d’une personnalité que nous devons respecter. »

    @paroless : je connais une école Motessori où on te fait payer l’entretien d’admission…

    ps: ce que je remarque et qui m’ennuie, c’est l’attitude consumériste qu’ont certains parents de l’école.

    [1] pour combien de temps encore ? http://www.rue89.com/2011/09/01/ins… )
    [2] « Apprendre à l’école », travaux de recherches en psychologie cognitive, de Claude et Mireille Bastien (cette dernière a d’abord été institutrice de nombreuses années avant de se tourner vers la recherche)
    « L’école, ça rend intelligent » http://www.scienceshumaines.com/l-e

  9. Réchèr

    Le dernier lien qui est donné : http://www.michaelolaf.net/google.h… est sympa et intéressant. Mais ça me gêne un peu qu’il soit considéré comme « une ultime preuve des atomes crochus entre Montessori et l’open source ».

    La position des fondateurs de Google, ainsi que de la société Google en elle-même, concernant l’open source, n’a jamais été très claire. Plusieurs articles du framablog le soulignent ! On n’a toujours pas le code source du fameux algorithme Pagerank.

    Le lien donne une liste de personnes célèbres ayant été éduqués par la méthode Montessori. Ce sont tous des gens très bien. Mais je n’en vois pas beaucoup qui ont fait quelque chose pour l’open source, ni même pour « l’esprit du Libre ». (Ils ont une bonne excuse : celle d’être né avant l’émergence de ces notions)

    Moi aussi je peux jouer à ce genre de raccourci un peu rapide : Jésus était quelqu’un de super, il s’est donné à fond pour l’open source : il a tenté de trouver et de partager le code source du monde réel !! Eh bien Jésus n’a pas du tout été éduqué par Montessori. Mince alors.

    L’article est très bien. Et je suis prêt à croire qu’il y a des atomes crochus entre Montessori et l’open source. C’est juste l’expression « ultime preuve », dans la dernière phrase, qui ne me va pas.

    Je sais que c’est un article traduit. Donc il faut reprendre exactement le propos de l’article original. Mais quand même, ça me gêne.

    Il est possible que je vainque ma flemme du dimanche pour traduire mon commentaire en anglais, et le poster sur le site de l’article original. (C’est ce qu’il faudrait que je fasse, en tout cas).

  10. PhilippeP

    Je suis libriste militant (ex-préz de Chtinux et membre du CA de l’April) mais surtout ancien élève de méthode Montessori (école Jeanne d’Arc à Roubaix, c’était il y a plus de 20 ans maintenant)

    Les commentaires, comme le billet du texte, se basent sur une idée idéalisée/fantasmée de la méthode Montessori.
    Je ne répondrai à tout ça qu’en disant que je suis très dubitatif sur l’effet de mode actuel autour de Montessori. Je n’ai jamais eu l’impression que Montessori a fait de moi quelqu’un de moins bien ou de meilleur.

    Pour ma part, je vois une énorme limite à Montessori pour le libre, un frein majeur. La méthode Montessori pure fait des enfants des individualistes. Les séances de travail en groupe sont limitées et ne favorisent pas l’apprentissage du travail en commun.
    Et ça, dans le logiciel libre, ça fait tâche.

    Pour résumer ce que je pense, je crois que Montessori n’est pas plus adapté au libre qu’une autre méthode.

    Désolé de ne pas approfondir mes arguments, je réponds sans prendre le temps d’y penser et en abusant d’un argument d’autorité 🙂

  11. paroless

    Depuis hier, je me rend compte compte que ce sujet me trotte dans la tête…
    Alors je suis revenue voir aujourd’hui, je ne voulais pas lancer une polémique au sujet du cout des écoles, elle existe partout sur les forums qui traitent du sujet et ça me blase un peu, hier j’ai répondu pour toute les fois ou je l’ai laissé passé. Ce rapport délicat avec l’argent existe partout, je ne vois donc pas l’intérêt d’en discuter (de cette manière tout du moins). Des écoles qui font payer l’entretien dadmission, ça existe en Montessori, ailleurs en privé aussi. Chacune est très différente vu que ce son des écoles privées, et il est hors de propos donc de faire des généralités.
    C’est vaste cette notion de liberté même accroché à celle de l’open source et je reste sur la touche pour le coup. Il serait peut-être intéressant de parler de recherche. Maria Montessori parle de l’être humain comme d’un être de recherche et les enfants qui bénéficient de cette pédagogie grandissent dans l’idée que l’être et les choses restent en mouvement (Steve Denning en parle dans son article). Elle n’est pas la seule pédagogue à en avoir parler, mais elle a poussé ses observations plus loin que d’autres. Quoi qu’il en soit, le fait de ré-écrire, re-travailler, me renvoie plus à la démarche de recherche qu’a celle de liberté- encore faut-il avoir la liberté nécessaire à entendre la recherche et donc la constante évolution.
    Il n’y a en effet pas de « fin » au travail que les enfants entreprennent , d’une part le matériel ET la pédagogie sont pensés de manière à ce que chaque chose apprise soit le résultat d’une recherche propre à chaque enfant, d’autre part quand on a l’impression d’avoir fait le tour d’une notion elle emmène l’enfant ailleurs. Les possibilités sont infinies, c’est intrinsèque à la pédagogie.
    (Le travail artistique en Montessori n’est pas enseigné à proprement parlé en effet. On donne à l’enfant une boite à outils et des pistes pour s’en servir, ce qu’il fait avec ne nous regarde pas, ou plutôt n’est pas soumis au jugement. La graphie est l’un de ses exemples. Il n’a jamais été dit qu’il ne fallait pas qu’un enfant dessine. Au contraire, il est de coutume de laisser des peintures, des crayons et un chevalet à l’enfant. Seulement, ce qu’il y fait est sont affaire. On apprend pas à dessiner un bonhomme…. et vive la créativité. Voilà je pense une des raisons pour lesquels les enfants issus de Montessori se laissent une grande liberté, c’est leur créativité qui s’exprime, une nouvelle manière de peindre un visage, une nouvelle manière de d’envisager un concept, une nouvelle manière de dire une chose mille fois dite pour l’entendre autrement!)

  12. layx

    Mon commentaire sera partial: J’ai côtoyé une classe Montessori de 8 enfants (de 3ans à 9 ans), dans un écovillage. J’en avais 22 et était en « recadrage d’activité » (comprenez mise au vert après dépression). Les ayants accompagnés lors de certaines activités (cuisine, sport, math, info), voici ce que j’ai perçu de leurs capacités:

    Multi langues: tout objet faisant son apparition dans leur environnement était apporté à la maitresse pour connaître son nom dans les autres langues (FR,DE,IT,ES,ENG), par LEUR initiative. Trois d’entre eux préféraient parler la langue pour laquelle ils avaient le plus de difficulté.

    Multi-tâches, sériel et parallèle : Un élève tombe lors d’une récréa-basket: Le groupe s’arrête, la plus grande des filles demande au blessé (genou écorché), si il a besoin d’aide: aide acceptée, elle l’accompagne vers la maitresse, et les autres reprenne leur partie (après avoir ré-équilibré les équipes…). Franchement, a part pour apprendre moi-même, je ne sais même pas pourquoi on m’a demande de garder un œil sur eux.

    « Forkables »: en cas de mésentente culinaire, il formaient plusieurs groupes (à nouveau de leur propre chef et généralement sans dispute) pour réaliser plusieurs recettes. Et je les ai même vu inventer un gratin de carottes à la cannelle, après qu’un test de deux séparés ai été fait. Résultat: c’était bon, mais pas du goût de chacun.

    Voili voilou pourquoi je pense que ce sont deux voies absolument complémentaires.

    Merci pour ces articles, et pour la possibilité d’expression.

  13. bouts

    Je ne remets pas en question les apports de Montessori : l’estime de soi, apprendre à apprendre, partir des besoins et centres d’intérêts de l’enfant etc. Cependant, il y a des limites à cette « méthode », d’un point de vue cognitif, en tous cas.

    Pour tout dire, la forme autant que le fond du texte de Denning relève pour moi du dogmatisme. « Nous avons trouvé *the* solution », ce qui a pour conséquence de ne plus s’interroger sur les pratiques pédagogiques et de ne pas tenir compte des évolutions à ce sujet. Ces dernières, tout comme l’individu, sont sans cesse en mouvement et vivent avec leur temps.

    Montessori n’est pas la seule à s’être intéressée à son époque à l’éducation des enfants. Ils sont nombreux, animés par les mêmes idéaux, inspirés par les mêmes idées. Le contexte historique était sombre (bouleversements de société liées à l’industrialisation, guerre) et le temps était à la scolarisation à grande échelle. Partout en Europe des écoles nouvelles ont vu le jour et tous ces « praticiens » étaient investis éthiquement et politiquement: l’enfant est le citoyen de demain.
    Pourquoi la « méthode » Montessori présente des limites ? D’une part, une recherche uniquement basée sur l’observation n’est pas suffisante. D’autre part, pour elle, les étapes de développement (que reprendra Piaget pour les formaliser) sont basées sur l’être « biologique », c’est à dire qu’elles sont pré-programmées dans l’espèce humaine (c’est ce qu’on entend par épistémologie génétique). Lorsque j’évoque la graphie, c’est aussi pour mettre l’accent sur l’aspect motricité qui prépare à l’écriture. L’écriture n’est-elle qu’une question de motricité ? De la même manière, pour Maria Montessori, l’apprentissage de l’alphabet est motivé par une préparation à l’alphabétisation, et non parce que constitutif du développement de l’enfant.

    Depuis, on a souligné le rôle essentiel des interactions (pairs à pairs/enseignant/), du milieu social, culturel, des affects dans les processus mêmes d’acquisition des connaissances. À contrario, sous l’angle de « l’être biologique », n’entrent pas en ligne de compte, dans la construction de la connaissance, émotionnel, relationnel, social et culturel. La notion de « groupe », de coopération chez Montessori a surtout une visée « sociale » (solidarité, entr’aide tout ça) mais n’est pas envisagée en tant que constitutive des apprentissages cognitifs.
    Je termine avec le jeu vu par Maria Montessori: c’est du « plaisir », quelque chose en périphérie de l’éducation. Hors, le jeu n’est pas seulement cela, mais permet l’émergence de la fonction symbolique, celle que l’on retrouve dans le langage.

    Bref, il n’y a pas *une* méthode, il y a des pratiques, des bonnes choses à piocher, parmi différents courants de recherche, chez des enseignants. Des pratiques à éprouver sans cesse, à interroger, faire évoluer, d’autant qu’on vit une autre révolution, celle de l’internet et de l’informatique qui apportent leur lot de complexité et de transformations, sociétales et mentales.

    Pour finir sur un coup de gueule, l’autre truc qui m’agace, c’est cette perception (doublée d’opposition) de l’éducation publique. Comme si on n’y trouvait que des précepteurs à la vision archaïque…comme si aucun des principes pédagogiques modernes n’y était appliqué…comme si les enseignants « râleurs » ne se souciaient pas d’abord de l’avenir de nos enfants…j’aime cette notion de citoyenneté confinée aux discussions de WE entre personnes bien pensantes (et je viserai volontiers les bobo:-) ), ces mêmes qui, à la première revendication des enseignants, pestifèrent pour des raisons pratiques à court terme (j’ai un boulot moi, je case où mon gamin? ). Et si ces mêmes s’intéressaient de plus près aux enjeux ? S’ils prenaient part réellement aux débats sur l’EN? S’ils étaient un peu plus solidaires de ceux à qui ils confient l’avenir de leur gamins ?