Quand il faut libérer ses propres données pour traiter un cancer du cerveau

Temps de lecture 2 min

image_pdfimage_print

Fondateur notamment du collectif Art is Open Source, Salvatore Iaconesi est un hacker, artiste, raver, ingénieur présent depuis une dizaine d’années sur la scène italienne. J’ai eu l’occasion de le rencontrer lors de mon séjour romain.

Très triste nouvelle  : il souffre d’une tumeur au cerveau.

Il demande à Internet, c’est-à-dire à la planète entière, de l’aider en publiant ses données personnelles médicales.

Sauf qu’il lui aurait été impossible de lancer cet appel s’il n’avait craqué lui-même ses propres données encapsulées nativement dans un format fermé et propriétaire, démontrant une nouvelle fois l’absurdité du système.

C’est pourquoi il a prénommé son appel «  mon traitement open source  », que nous vous proposons traduit en français ci-dessous.

Transmediale - CC by-nc-sa

Mon traitement open source

my Open Source Cure

Rome, le 10 septembre 2012
(Traduction  : Unagi, lilian, Vincent)

J’ai un cancer du cerveau.

Hier, j’ai reçu mes résultats médicaux, sous forme numérique. Je dois les montrer à plusieurs médecins.

Malheureusement, ces fichiers sont dans un format fermé et propriétaire, et donc je n’ai pas pu les ouvrir avec mon ordinateur, ou les envoyer dans ce format à toutes les personnes qui auraient pu me sauver la vie.

Je les ai craqués.

J’ai ouvert les fichiers et je les ai convertis en formats ouverts pour pouvoir les partager avec tout le monde.

Aujourd’hui seulement, j’ai pu partager les données médicales (à propos de mon cancer du cerveau) avec 3 docteurs.

Deux d’entre eux ont déjà répondu.

J’ai pu faire cela parce que les données utilisées étaient dans des formats ouverts et accessibles  : ils ont ainsi pu ouvrir les fichiers sur leurs ordinateurs ou tablettes. Ils ont pu répondre de chez eux, un dimanche.

Je publierai progressivement toutes les réponses que je recevrai, en utilisant des formats ouverts, afin que n’importe qui avec la même maladie puisse bénéficier des solutions que je trouverai.

Ceci est un TRAITEMENT. C’est mon TRAITEMENT OPEN SOURCE.

Ceci est une large invitation à participer au traitement.

TRAITEMENT, n’a pas la même siginification selon les cultures.

Il y a des traitements pour le corps, pour l’esprit, pour la communication.

Prenez les informations sur ma maladie, si vous voulez, et donnez-moi un TRAITEMENT  : créez une vidéo, une oeuvre d’art, une carte, un poème, un jeu, ou essayez de trouver une solution à mon problème de santé.

Artistes, designers, hackers, scientifiques, médecins, photographes, vidéastes, musiciens, écrivains. N’importe qui peut me donner un traitement.

Créez votre traitement en utilisant le contenu que vous trouverez dans la section DATI/DATA de ce site, et envoyez le à info@artisopensource.net.

Tous les TRAITEMENTS seront diffusés ici.

Crédit photo  : Transmediale (Creative Commons By-Nc-Sa)

11 Responses

  1. Thierry Stoehr

    Les formats fermés qui peuvent empêcher de soigner : un nouvel exemple terrible.
    Bien sûr, même l’éditeur du format propriétaire concerné dira que c’est une approche qu’il soutient (mais ouvrira-t-il pour autant ledit format ?).
    Courage à Salvatore Iaconesi, l’ouverture gagnera.

  2. gnuzer

    S’il ne s’agissait du cerveau, je qualifierais volontiers cette initiative d' »opération hacker ouvert ».

  3. tuxmouraille

    Bonjour,
    A noter que le format DICOM, disponible sur son site est un format ouvert pour l’imagerie IRM et Scanner, et est censé être le standard.

    Il est vraiment dommage qu’aujourd’hui, alors que c’est un de leur outils de travaille, les soignants ne s intéressent pas plus aux formats qu’ils utilisent, sous prétexte que l’informatique n’est pas leur métier.

  4. Drunken Kiwi

    Courage à Salvatore en espérant que son appel aura un bon écho auprès des autorités médicales.

    C’est triste de voir que les formats fermés et les industries qui les imposent auprès des hôpitaux ont plus de poids que la vie des malades. Triste monde.

  5. bob

    Selon la legende urbaine, rien de meilleur qu’un combat encore à mener pour garder sa peche & depasser (voir vaincre) la maladie.

    Il est consternant d’en arriver à « utiliser » des cas comme celui-ci, pour encore une fois faire montre de la bétise du systeme (ou buisness), où la propriété fait obstacle au vivant.

    à suivre …

  6. Quentin THEURET

    Quand on voit cela : http://www.msf.fr/stop-novartis/ , je me dit que les choses ne sont pas prêtes de changer. Mais le combat doit continuer, car la route est longue, mais la voie est libre !

    L’enfermement des données (tout comme les brevets) n’est pas prête de mourir tant que les politiques publiques ne prendront pas la peine, non pas d’émettre des recommandations, mais d’obliger l’utilisation de standards ouverts. Seuls les pouvoirs publics ont la force d’imposer de telles choses aux éditeurs de logiciels.

  7. jsat

    Je ne comprends pas trop si les « données propriétaires » sont celles en format DICOM, si tel est le cas, c’est une jolie erreur d’interprétation. DICOM est un standard de communication et de stockage fortement documenté. On ne peut pas forcément parler de format open-source, mais de là à parler de hacker les données pour pouvoir les lire, c’est légèrement exagéré. Le nombre de logiciels opensource pouvant lire ce genre de données est énorme (voir le projet Debian-Med avec Ginkgo CADx, gdcm, dcmtk, slicer3D – voir d’autres projets OsiriX, VR-Render, etc …)

  8. tonton

    A priori oui, il s’agit des données DICOM, il n’y a rien d’autre sur son site à part un scan de son dossier médical papier, et les 3 séries d’imagerie (scanner CT + 2 IRM). C’est effectivement exagéré, la norme DICOM est un standard utilisé depuis au moins 15 ans par tous les constructeurs dans le domaine médical, et ce pour une grande majorité des données (on ne doit pas être loin des 100% pour ce qui est imagerie).
    Et c’est une erreur de convertir en jpg, les médecins sont parfaitement capable d’ouvrir du DICOM, et ce format contient de précieuses données supplémentaires indispensables pour l’exploitation de certaines modalités d’imagerie (comme la scintigraphie/TEP), et très utiles pour les autres (taille des voxels, orientation patient, espacement des coupes, paramètres d’acquisition des images, …), en plus d’avoir une meilleure dynamique (de 12 à 16 bits au lieu de 8).
    Vu la quantité d’informations disponible sur le net, et vu le nombre de logiciels respectant cette norme, il n’a pas du chercher très longtemps si il a eu besoin de « cracker » les images pour les lire. Même la commande « display » de imagemagick est capable de les afficher …

  9. freem

    @tonton & jsat:

    Dans le post, il est juste dit qu’il à cracké les formats proprio qui étaient utilisés, afin de diffuser des versions dans un format ouvert.
    Ce qui implique que TOUT ce qu’il diffuse est ouvert, donc le format DICOM.

    On ne peut qu’en déduire que les données originales N’UTILISAIENT PAS ce format DICOM mais un autre qui ne semble pas cité.
    Après… j’ai pas été chercher les sources, peut-être l’article est-il trompeur.

  10. asciia

    Bonjour, je souhaiterais savoir quels sont les droits d’utilisation concernant mon dossier de patient français. Une fois que j’y ai accès est-il possible de l’utiliser pour différents projets artistiques qui seront publics par exemple ? est-il nécessaire d’anonymiser les documents ou bien n’est ce pas légalement obligatoire ?
    Merci pour vos renseignements.